Femmedesport rencontre Zoé Pellicier, entrepreneuse créatrice de la marque d’upcycling 3e manche et monitrice de ski !
Pour commencer, est-ce que tu peux te présenter ?
Je m’appelle Zoé Pellicier, je suis originaire de Maurienne, et je fais du ski depuis toute petite. Je suis la fondatrice de 3e manche et je suis aussi monitrice de ski l’hiver en Maurienne.
Est-ce que tu peux nous parler un peu plus de ta marque, 3e manche ?
Zoé Pellicier: 3e manche c’est une marque d’upcycling qui revalorise les tenues professionnelles hivernales. J’ai commencé avec les tenues des moniteurs de ski parce que c’est ce qui me touchait personnellement. Nous n’avions pas de solutions pour revaloriser nos tenues localement. Ce sont des tenues d’entreprise donc on ne peut pas les donner ni les vendre. Nous avions très peu de solutions à part les garder au placard.
Et ce n’était vraiment pas l’idéal. C’est pourquoi je voulais proposer une solution aux moniteurs de ski pour proposer une deuxième vie qui a du sens à leurs tenues. Et du coup je fais plein d’accessoires. Ça va de l’accessoire vêtement donc sac, banane, bob, à l’accessoire décoratif comme des coussins, des cales portes etc. On essaye de proposer de plus en plus de choses, de plus en plus de produits qui répondent aux demandes des clients avec différentes matières qu’on peut trouver en montagne.
Les tenues des moniteurs, quelle est leur durée de vie ?
Zoé Pellicier: En moyenne, on change de tenues professionnelles tous les deux ans. Cela dépend des écoles de ski. Et on n’a pas de solution de revalorisation. Il y a certaines initiatives qui existent comme les envoyer dans d’autres pays, au Népal par exemple pour qu’elles servent là-bas. Mais ce n’est pas une solution qui permet de revaloriser la majorité des tenues. Le but c’est d’avoir une solution qui est complémentaire et locale.
Quelles difficultés as-tu rencontrées en te lançant dans ce projet ?
Zoé Pellicier: Des difficultés, il n’y en a pas de grande. Mais il y a toujours des barrières, surtout pour un projet d’upcycling. Ce n’est pas toujours facile. Notamment on a des coûts plus élevés quand on fait tout en France. Il faut convaincre par rapport au coût et arriver à démontrer la valeur que ça a. Même si l’upcycling et le développement durable ça parle à de plus en plus de monde. Il y a quand même un peu une réticence globale.
Je dirais que le plus gros frein c’est ça. D’arriver à convaincre les partenaires, les entreprises de l’impact et de la valeur que ça a. Même s’ils sont de plus en plus réceptifs, le coût est souvent un frein. Mais vu que c’est du made in France, de l’upcycling on n’a pas vraiment le choix. C’est la perception de valeur qui parfois bloque un peu. Mais je pense qu’à l’avenir ce genre de projet sera de plus en plus commun et que ce sera la nouvelle norme. Il y a encore un petit bout de chemin qui doit être fait.
Au niveau du processus de création, comment cela se passe-t-il ?
Zoé Pellicier: J’organise en général des collectes avec les directeurs / directrices d’écoles de ski. Ils font passer le mot aux moniteurs qui vont ramener leurs tenues à l’école. Et ensuite soit je me déplace pour aller les chercher soit l’école de ski me les apporte. Ensuite, tout le travail de désassemblage, de lavage, de tri est fait à Albi en Maurienne par mes soins et l’aide de ma famille. Puis toute la matière est triée pour les différents produits et différentes productions. Elle est ensuite envoyée dans les différents ateliers partenaire qu’on a.
On travaille principalement avec des ateliers de réinsertion professionnelle qui sont dans la région. Ou encore avec des couturières indépendantes si les produits sont un peu plus techniques et demandent des machines spéciales ou un savoir-faire plus pointilleux. On répartit les produits selon le savoir-faire des ateliers avec lesquels on travaille. Les ateliers s’étendent de la Maurienne jusqu’à Lyon ou Saint Etienne au plus loin.
Où vendez-vous vos produits ?
Zoé Pellicier: Pour l’instant, on vend principalement en France. Le but c’est de faire des envois en Europe assez rapidement. Il faut que je traduise le site internet. Sinon l’hiver on a aussi des partenariats avec des magasins de ski en dépôt vente dans les stations de ski. Et l’été je fais pas mal de marchés, d’événements d’upcycling pour promouvoir la marque afin que les gens puissent voir les produits en vrai. Je pense que c’est important pour faire connaître le concept. Les gens sont beaucoup plus réceptifs en rencontrant la personne qui a créé ça et pour comprendre l’histoire qu’il y a derrière. C’est super intéressant de discuter avec la clientèle. Ils me donnent de super idées, me font des retours sur les produits. Et ça me permet de progresser et de faire évoluer 3e manche.
Est-ce que tu peux me parler du métier de moniteur de ski que tu exerces à côté du développement de ta marque ?
Zoé Pellicier: Monitrice de ski parce que le ski est ma passion depuis que je suis toute petite. Je suis née dans une famille de skieurs donc ça m’a assez vite donné le goût du ski, de la vitesse, de tous les sports de glisse. Je pense que j’ai été mise sur des skis à 2-3 ans pour la première fois, même si ce n’était pas du grand ski à l’époque ! J’ai été mise dans le bain assez jeune, et ensuite j’ai fait pas mal de clubs, de compétitions etc. Cela m’a donné le goût de me dépasser, de progresser, de m’entraîner. J’ai ensuite arrêté la compétition et me suis mise à passer mon monitorat de ski. Je me suis découvert une passion pour enseigner et transmettre. Je trouve que c’est super gratifiant, de voir les gens qui avaient potentiellement peur du ski à la base qui après adorent ça. C’est super motivant.
Je pense que c’est un beau sport qui malheureusement est très menacé par le réchauffement climatique. J’ai vraiment à cœur de pouvoir à mon échelle continuer à protéger la montagne, à réduire mon empreinte carbone comme je peux avec 3e manche. Et à pouvoir continuer de skier, de faire du ski de rando de manière un peu plus responsable à l’avenir.
Et tu arrives à combiner ces deux activités, qui doivent quand même te prendre pas mal de temps ?
Zoé Pellicier: L’hiver je fais la saison en monitrice et du coup je n’ai pas de période de production ou de collecte de matériaux à ce moment-là. De toute façon les moniteurs et les écoles de ski n’ont pas le temps de gérer cette partie-là pendant l’hiver. Je me consacre vraiment à mon activité de monitrice, tout en ayant les produits en vente dans les magasins partenaires. Et je continue également de faire tout ce qui est mails, suivi des projets en cours, l’envoi des commandes via le site internet et la communication sur les réseaux sociaux. Je continue ces 3 choses tout au long de l’année. Mais le reste est beaucoup moins présent, ce qui me permet de dégager du temps pour l’enseignement.
Quels sont tes projets à l’avenir, tes objectifs pour ta marque ?
Zoé Pellicier: C’est que plus de monde connaisse 3e manche. Que ce soit reconnu comme la marque d’upcycling de tenues professionnelles hivernales. On est vraiment spécialisé et ce sont des tenues qui sont très complexes à désassembler, etc.
Le but c’est d’être reconnu en tant que solution de revalorisation pour toutes ces tenues techniques, et que de plus en plus de monde porte du 3e manche. Que l’on soit également présent dans plusieurs pays d’Europe dans les magasins partenaires. Que l’on puisse valoriser encore plus de matières que l’on trouve en montagne. Là récemment on a revalorisé des matelas de pylônes de télésièges, des bâches, pour faire des trousses de toilettes. On est ici sur un matériau qui est encore plus robuste. Le but c’est d’avoir encore plus de matériaux techniques qui doivent être changés souvent pour des raisons de sécurité et de leur donner une deuxième vie locale qui a du sens.
Tu as d’autres idées de matériaux que tu pourrais réutiliser à l’avenir ?
Zoé Pellicier: Il y en a pas mal. Par exemple les bâches publicitaires qu’il y a devant les magasins de ski qui changent souvent. Après sur les pistes il y a les matelas, mais aussi tout le matériel technique des pisteurs qu’ils doivent changer fréquemment. Il y a aussi les housses des sièges des télésièges quand ils les changent même si c’est moins récurrent. Il faut imaginer des produits qui se prêtent à être faits avec ces matières-là. Mais il y a pleins de choses à faire.
Comment est-ce que tu comptes te développer et surtout te faire connaître, faire parler de 3e manche ?
Zoé Pellicier: Je pense qu’on a de la chance à l’heure actuelle avec notre génération et les réseaux sociaux. Ça nous permet de toucher un nombre de personnes assez fou et surtout d’univers totalement différents. Se faire connaître à pleins de personnes que dans la vie réelle on n’aurait peut-être pas pu toucher. C’est un outil qui est assez puissant.
Et après continuer à rencontrer les gens, avoir plus de dépôts vente et de magasins qui revendent 3e manche dans plusieurs villes en France et d’autres villes en Europe. Je pense qu’avec ce genre de projet qui défend des valeurs que beaucoup de personnes ont de plus en plus, il y a pas mal de bouche-à-oreille. Cela permet aussi de se faire connaître comme ça de manière un peu plus naturelle.
Quels conseils donnerais-tu aux femmes qui souhaitent se lancer en tant qu’entrepreneuses ?
Zoé Pellicier: Qu’il faut se lancer ! Ça peut faire peur au début parce qu’on va dans l’inconnu. Après femme comme homme je pense que l’entrepreunariat est quelque chose qui est inconfortable au début. Parce que ça vous fait vraiment sortir de votre zone de confort, faire des choses que l’on n’a pas l’habitude de faire, toucher un peu à tout, même des choses que l’on n’aime pas.
Mais c’est quelque chose qui est ultra motivant parce que c’est notre projet, ça découle de nos valeurs, de ce qu’on a envie de faire. Donc c’est profondément motivant. Il faut se lancer, même s’il y aura forcément des échecs c’est pour faire ce que l’on aime.
Après le fait d’être une femme ça dépend des corps de métiers mais il y a souvent un peu plus de barrières. Mais il ne faut pas s’arrêter à ça. Il faut foncer, il faut essayer. Il n’y a pas de raison que ce soit plus compliqué que pour quelqu’un d’autre.
Le mot de la fin ?
Zoé Pellicier: J’invite tout le monde à découvrir ce que l’on fait avec 3e manche. S’ils ont des idées de produits ou de matières à revaloriser en montagne, je les invite à nous envoyer un message. Ça fait toujours plaisir d’avoir des retours constructifs et ça nous aide beaucoup.
Je suis persuadée que l’upcycling c’est l’avenir et qu’il y a pleins de choses à faire. Relocaliser les productions en France et en Europe, plus proches du marché que l’on vise a beaucoup de sens. Parce que ça pollue moins, parce que c’est plus responsable. Il y a pleins de choses qui en découlent, ça crée de l’emploi local.
Et parce qu’il y a des gens qui partagent ces valeurs je les invite à aller suivre 3e manche sur les réseaux sociaux, à aller voir ce que l’on fait sur le site internet et à nous envoyer un petit message si ils ont des retours à nous faire. Cela nous aide beaucoup !
Merci à Zoé Pellicier pour cet entretien ! Pour découvrir les différents produits de 3e manche, cliquez ici.
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