Interview avec Caroline Fruchaud, sportive handisport et fondatrice de HOSTOBOX
« Ne jamais abandonner, on peut toujours rebondir après chaque épreuve. »
Femme de sport : Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Caroline Fruchaud : Je m’appelle Caroline Fruchaud, j’ai 32 ans. Je suis chef pâtissière de formation. J’ai travaillé pendant cinq à six ans dans des restaurants gastronomiques à Paris et à la montagne. Il y a environ six ans et demi, j’ai eu un accident de ski qui m’a rendue paraplégique. Depuis, je suis en fauteuil roulant. J’ai créé une entreprise appelée HOSTOBOX qui propose des boîtes cadeaux destinées aux personnes hospitalisées, avec des produits fabriqués en France et livrés directement à l’hôpital. Je suis aussi une passionnée d’aventures et de sport, et je trouve cela vraiment génial !
Femme de sport : Le sport occupe-t-il une grande place dans ton quotidien ?
Caroline Fruchaud : Oui, c’est une grande partie de ma vie. Je pratique le basket fauteuil deux à trois fois par semaine. Et le week-end, je fais beaucoup de vélo. J’aime sortir avec des amis. Ils m’aident à sortir mon vélo du garage, puis on part pour 30, 40, 50 km. C’est vraiment super !
Femme de sport : Le basket et le vélo sont les deux sports que tu pratiques ?
Caroline Fruchaud : Ce sont les deux sports que je pratique régulièrement. En hiver, j’aime aussi passer une semaine au ski. Après mon accident en mai 2018, je suis retournée sur les skis dès février 2019, car j’adore ça ! L’été, je fais également du wake ski. C’est un sport assis qui combine le surf et le canoë. Peu importe que tu sois handi ou valide, il n’y a pas de différence sur l’eau. Ce sport procure une sensation de glisse incroyable. J’aime beaucoup cette sensation, car elle ressemble à celle que je retrouvais dans le surf allongée. C’est plus facile de prendre les vagues avec la pagaie.
Femme de sport : Le risque est-il plus grand pour une personne en fauteuil que pour une personne valide ?
Caroline Fruchaud : Il y a toujours un risque, mais on porte un gilet de sauvetage. Personnellement, je ne fais pas de wake ski toute seule ; je le pratique en tandem avec un ami qui est champion du monde de wake ski. C’est un peu compliqué à organiser seule, donc il y a toujours quelqu’un pour m’aider à gérer le matériel. C’est un sport génial, une vraie sensation de liberté ! Plus récemment, je me suis lancée dans une activité qui pourrait être comparée à du trail ou de la course à pied, mais en fauteuil. Après mon accident, j’ai participé au semi-marathon de Paris. J’y suis allée avec des amis, et je suis la seule à m’y être inscrite. J’avais un groupe d’amis valides pour me soutenir, c’était vraiment génial. Avant mon accident, je courais beaucoup. Mais c’était principalement pour l’entraînement, car mon métier ne me laissait pas beaucoup de temps. J’ai également participé à un triathlon. Et plus récemment, au Marathon des Sables.
Femme de sport : Comment t’es-tu préparée pour ces épreuves ?
Caroline Fruchaud : Je pense que j’aurais pu faire plus, mais c’est jamais assez. La préparation nécessite beaucoup de renforcement musculaire, notamment au niveau des épaules. La musculation est essentielle car c’est un mouvement répétitif, ce qui peut être assez traumatisant pour les épaules. Il faut donc bien se préparer. Il y a aussi du vélo, car le mouvement est assez similaire. Et bien sûr, il faut bien dormir, boire suffisamment et manger équilibré comme pour n’importe quel sport. Au lieu de faire des étirements pour les jambes, on les fait pour les bras. À mon avis, c’est la seule différence avec les personnes valides.
Femme de sport : As-tu quelqu’un qui te suit au quotidien dans tes entraînements ?
Caroline Fruchaud : Au quotidien, non. Mais je suis suivie par ma kinésithérapeute pour le renforcement musculaire, et elle me donne des exercices que je peux faire à la maison. Si je devais me lancer dans des entraînements plus intensifs, je chercherais un suivi plus professionnel.
Femme de sport : Tu as également fait plusieurs voyages à vélo. Peux-tu nous en parler ? Comment tu t’organises, comment tu t’entraînes, et comment tu découvres de nouveaux horizons ?
Caroline Fruchaud : Oui, j’ai fait plusieurs voyages à vélo. Par exemple, nous sommes partis de Versailles jusqu’au Mont-Saint-Michel. Puis l’année suivante du Mont-Saint-Michel jusqu’à Nantes. L’an dernier, nous avons fait Blois jusqu’à Angers. Cette année, je n’ai pas pu en refaire, car je me suis cassé le bras en janvier. Ce qui a rendu les projets compliqués. Les deux premiers voyages, je les ai faits avec ma sœur, une grande cycliste. Elle portait mon fauteuil dans une petite charrette pour enfants, avec notre tente et nos sacs. C’était une aventure incroyable, parcourir 400 km en 9-10 jours avec l’énergie des bras. Plus tard, pour un voyage Blois-Angers j’ai ajouté une assistance électrique sur mon handbike, car mes amis ne pouvaient pas m’aider autant que ma sœur. L’organisation est un vrai défi logistique. Mon vélo est assez encombrant et difficile à transporter, mais on a réussi à s’adapter notamment avec des itinéraires adaptés. On dormait soit en tente, soit dans des endroits grâce à des applications comme Welcome to My Garden, Warm Shower etc. où des cyclistes offrent un hébergement. C’est une superbe expérience de rencontrer ces gens et de sensibiliser au handicap.
Femme de sport : Peux-tu nous en dire plus sur le Marathon des Sables ?
Caroline Fruchaud : Le Marathon des Sables est une aventure extraordinaire. Avec une dizaine d’équipes handisport, nous avons eu l’opportunité de participer. Myriam et Pierre qui sont un couple d’aventuriers, ont réalisé cet exploit l’année précédente. Ils ont ouvert une liste pour l’édition suivante et j’ai eu la chance d’être sélectionnée avec ma sœur. Mon équipe était mixte avec Benjamin, un sportif incroyable. Il ne connaissait rien au handicap mais a été un véritable atout. Ce fut une expérience inoubliable.
Femme de sport : As-tu rencontré des difficultés pendant cette aventure ?
Caroline Fruchaud : La première difficulté était de partir dans un désert où il faisait très chaud, avec 50 km à parcourir sur 3 jours. Sur le papier c’était assez intimidant, mais très stimulant. Une tempête de sable suivie de pluie, a changé la donne en nous permettant de mieux rouler que prévu. L’organisation était aussi unique : une personne poussait mon fauteuil, une autre tirait à l’avant. Le but était que chaque membre de l’équipe participe à l’effort.
Femme de sport : En plus de ton parcours sportif, tu as créé HOSTOBOX. Peux-tu nous en dire plus ?
Caroline Fruchaud : Après mon accident, ma famille m’a apporté une boîte à chaussures pleine de petits objets sympathiques. Cela m’a donné l’idée de créer HOSTOBOX. Ce sont des boîtes cadeaux pour les personnes hospitalisées, offrant des produits fabriqués en France. L’objectif est de rendre le quotidien à l’hôpital un peu plus agréable, que ce soit pour les patients atteints de cancer ou pour le grand public. Ces boîtes sont une alternative aux traditionnels cadeaux comme les fleurs ou les chocolats, et sont livrées directement à l’hôpital. Je travaille également avec des associations pour créer des boîtes dédiées à des publics spécifiques.
Femme de sport : As-tu eu des moments de doute pendant ton parcours ?
Caroline Fruchaud : Bien sûr, il y a toujours des moments de doute. L’entrepreneuriat, c’est une aventure pleine d’incertitudes, surtout sans formation en commerce. Mais les doutes sont souvent plus présents dans la gestion de mon entreprise que dans le sport. Le sport, même avec des catégories inégales en handisport, m’a appris à surmonter les obstacles.
Femme de sport : Que dirais-tu à une personne qui traverse une épreuve difficile ?
Caroline Fruchaud : Ne jamais abandonner. La roue tourne. Il faut se donner les moyens de rebondir, de ne pas se laisser abattre. Entourez-vous des bonnes personnes, n’ayez pas peur de demander de l’aide. Les réseaux sociaux nous montrent aujourd’hui ce qu’il est possible de réaliser. Ma famille m’a énormément soutenue, et c’est essentiel de bien s’entourer. Je suis dans une association qui s’appelle “comme les autres” qui aide les personnes qui ont eu un accident de la vie à rebondir. Pouvoir partager son vécu avec d’autres est super intéressant pour essayer de se sentir moins seul.
Femme de sport : As-tu des projets à venir ?
Caroline Fruchaud : Oui, plein ! Je veux continuer à développer HOSTOBOX, et j’ai plusieurs projets de voyages et d’aventures sportives. Par exemple, je prévois de refaire le semi-marathon de Paris, de retourner sur le Marathon des Sables et de réaliser encore de nouvelles courses et défis sportifs.
Femme de sport: Le petit mot de la fin
Caroline Fruchaud: Ne jamais abandonner. Toujours se dire que même si c’est la galère aujourd’hui, demain sera un autre jour. On peut toujours arriver à rebondir après chaque problème.
Merci à Caroline Fruchaud pour cet incroyable échange si enrichissant. Nous lui souhaitons plein de réussite et de bonheur pour la suite. Si vous souhaitez rejoindre cette aventure, n’hésitez pas à la contacter ! Retrouvez également son site HOSTOBOX.
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